Aujourd'hui on m'a demandé d'écrire ce qu'était l'amour pour moi. J'aurais pu répondre des choses compliquées, des choses que personne n'aurait comprises, des choses absurdes, rien que l'amour est absurde de toute manière ... J'aurais pu faire tout ça mais ça n'a pas été le cas. Je n'ai mentionné qu'une chose, une seule et unique ton nom, Guillaume. Si on me demande qu'est ce qu'aimer je ne trouve pas une seule autre réponse ... Personne n'a d'importance, personne ne me fait confiance, je ne fais confiance à personne, tout le monde me juge, tout le monde est parfait, sauf toi, tu es l'exception qui confirme cette putain de règle Guillaume. Mais t'es trop con, trop aveugle. Tu vois rien et moi, je suis assez bête pour tout laisser se faire ! Faudrait que je me réveille un jour ou l'autre, la vie c'est pas aussi simple, et l'amour encore moins ! Personne ne comprend. Pour ça, il faudrait que je sache moi même ou j'en suis. Putain quelle galère.
Tu te souviens de tout ce qu'on s'est dit ? De toutes nos paroles précieuses ? Ce jeu de cap ou pas cap nous a pris au corps pour ne plus jamais nous quitter. Voilà les plus grands souvenirs que j'en ai ... :

« Qu'est-ce que tu feras quand tu seras grand ? »
« Tyran ! »
« Ouah tyran ? Avec tout un peuple asservi ? »
« Parfaitement ! Avec un Harem, des esclaves que je torturerai chaque jeudi matin. »
« Cool ! »
« Et toi ? »
« Ben, je... Non c'est idiot. »
« Allez dis-le ! »
« Non ça va pas te plaire. »
« Moi je te l'ai dit ! Raconte ! »
« J'aimerais être un flan. Un flan aux abricots ou nature tiens ! Un peu tiède dans une boulangerie en vitrine. »
« Un flan ! Comme le gâteau ? »
« Ben évidement qu'est-ce que tu veux que ce soit d'autre ? Y'en a pas 46 000 des flans. »
« Un flan... un flan ? Ah mais ouais un flan ! Mais ouais, mais c'est super génial. »

On était gamin, âgés d'à peine sept ans, on était plus mature que tout le monde et on avait de grands projets pour notre avenir comme peut en témoigner ce dialogue. On s'était juré qu'un jour on gouvernerait le monde, où est-ce que tout ça est passé ?

«Alors, t’es amoureuse ? T’es pas obligée de répondre, c’est juste une question. »
« J’ai personne dans mon lit si c’est ce que tu veux savoir... Enfin, personne que je n’puisse changer avec les draps. Il est footballeur, il s’appelle Leonyes Babylonis... Enfin s’appelait je l’ai largué ce matin. »
« Comment t’as pu sortir avec un mec qui a un nom à coucher dehors ? »
« Bah justement, j’en avait marre de coucher dehors. »
« Et depuis ce matin, rien d’autre ? »
« A part Leonyes ? Euh... Alerandros son copain, Filipe son père, un Paulo, deux trois Kévin, le prince de Cendrillon, les droïdes de la guerre des étoiles enfin tu vois rien de bien sérieux. Un cœur à prendre. »

Ça, c'était quand on avait 16 ans. Tu étais toujours à me poser des questions sur mes petits-amis, tes paroles étaient fourrées de sous-entendus et je t'avais tendu des maxi perches mais t'as pas été foutu à aucun moment de les attraper, tu ramais, tous les jours un peu plus. Quand je dis que t'es un con je fais en partie référence à ça. Tu joue trop Guillaume, à force de jouer avec le feu tu finiras par te brûler !

« Va en enfer ! »
« D'accord, mais tu m'y accompagnes. On se revoit pas pendant 3 ans. »
« Arrête Guillaume, ça va finir en cap ou pas cap ... »
« Je serais cap Louise, je serais toujours cap, mais t'oseras jamais me demander ça, tu as bien trop besoin de moi. »
« Tu me connais mal. Cap ou pas cap de partir de Rouen pendant quatre ans sans me parler, sans me revoir, sans revenir ici ? Répond Guillaume, cap ou pas cap ?! »
« Tu t'souviens ? C'est ce jour là où tu m'as dit que je serai jamais cap de t'faire du mal... Cap ! »

On avait dix-sept ans et j'ai fait la plus belle connerie de ma vie ce jour là ... Je pensais pas qu'il pourrait le faire, qu'il oserait, qu'il accepterait de m'abandonner. Il était parti deux semaines plus tard me laissant comme ultime mot : à dans trois ans.


« Tu crois au coup de foudre ? »
« Ben ouais... »
« Naïve ! Tu sais y a deux trois trucs que tu m'as jamais demandé et que je regrette. J'aurais été cap. »
« Genre ? »
« Manger des fourmis... Insulter les chômeurs qui sortent de l'ANPE... T'aimer comme un fou... »
« T'es vraiment trop con, t'as pas changé. Ce qui t'éclate c'est me faire mal, me faire vraiment mal ! Je te déteste ! »

Il était bien revenu trois ans après, au jour près. Je ne l'avais pas vraiment accueilli comme si c'était une grande retrouvailles. Quelque part je lui en voulais, je lui en voulais d'avoir été cap et de pas avoir pensé à moi. Il était entrain de me dire qu'il aurait pu m'aimer, m'aimer comme jamais. Il l'avouait enfin mais c'était trop tard. Je l'aimais toujours, toujours et encore, inlassablement mais je le haïssais tout autant. Savait-il à quel point il m'avait blessé ? Se rachèterait-il ? Il pourrait tout obtenir de moi avec un cap ou pas cap, tout.
Et même sous ses airs innocents, je sais qu'il tient à moi, vraiment. Il est venu me rejoindre dans ce putain d'internat pour me voir, pour me retrouver.

Les amis, c'est comme les lunettes, ça donne l'air intelligent, mais ça se raye facilement et puis ça fatigue... Heureusement, des fois, on tombe sur des lunettes vraiment cool. Moi, j'ai Guillaume.